Autos Portraits

Laurent et sa Ford Mustang 289

La passion du Tour-Auto

Fin Octobre à Paris, avec Jeremy, nous retrouvons Laurent pour nous parler de sa Ford Mustang.

Laurent, je le connais depuis 15 ans, dans une vie qui n’a rien à voir avec l’automobile. Mais ce n’est qu’assez récemment, au détour du hasard d’une rencontre dans les allées de Retromobile, que j’ai découvert le côté Mr Hyde qui complète le Dr Jekyll que je connais de longue date.

Rendez-vous est donc donné à l’aube devant l’Hôtel des Invalides pour échanger au sujet de sa Ford Mustang 289 de 1965. 

Cette Ford Mustang, je l’ai déjà vue il y a quelques mois sur les routes du Tour-Auto 2023, et justement, c’est en la voyant courir au milieu des Lotus Elan 26R et autres Shelby Cobra 289 que j’ai eu envie de mieux comprendre qu’est-ce qui avait poussé Laurent à faire le choix de la Mustang.

Car avant de courir en Compétition avec son américaine, Laurent a déjà couru 2 éditions de l’épreuve, mais sur le plateau de Régularité, au volant de son Alfa Romeo 2000 GTV de 1972.

 

 

 

 

Laurent, ses participations au Tour-Auto

2021 (Régularité) : 17ème sur ALFA ROMEO Giulia 2000 GTV de 1972

2022 (Régularité) : 15ème sur ALFA ROMEO Giulia 2000 GTV de 1972

2023 (Compétition) : 61ème sur FORD Mustang 289 de 1965

 

 

 

Alors Laurent, pourquoi la Mustang ?

Après 2 éditions avec l’Alfa en Régularité, j’avais envie de passer en Compétition. Mais hors de question de préparer l’Alfa en vue d’obtenir le PTH (Passeport Technique Historique) indispensable à l’engagement en Compétition. J’ai donc cherché un véhicule dédié à la compétition.

Mon premier critère : une voiture un peu atypique, que l’on n’a pas l’habitude de voir sur le Tour Auto.

Après avoir regardé du côté des Jaguar MKI, je me suis heurté à la difficulté de trouver un spécialiste capable de la viabiliser et de la préparer pour la compétition en restant dans mon budget.

J’ai ensuite regardé les MGA, mais je trouvais que les performances se rapprochaient trop de ce que je connaissais déjà sur le coupé Bertone. J’ai donc abandonné pour m’orienter vers des modèles un peu plus performants.

C’est à ce moment que j’ai commencé à regarder la Mustang, avec son V8.

Une fois le modèle fixé, encore fallait-il trouver la bonne.

Des modèles déjà préparés ? Au moment où je cherchais, il n’y en avait qu’une à vendre, mais qui sortait du budget que je m’étais fixé.

Me voici donc parti à la recherche d’une base saine pour la faire préparer moi-même.

Là, je tombe sur de nombreux modèles aux USA, à importer. Ca, je ne voulais pas car en achetant la caisse sur photo, la moindre mauvaise surprise à l’arrivée remettait en question ma participation au Tour Auto.

Je fais donc le tour des Mustang disponibles en France, et sans surprise sur des voitures anciennes, je tombe sur des exemplaires à l’historique chaotique : mauvais moteurs, châssis découpés et/ou rouillés, voitures non immatriculées…

Puis je tombe sur celle-ci : 2ème main, importée il y a 20 ans, totalement d’origine. 

La voiture est propre, mais dans son jus : boite 3 d’origine, freins et pneus hors d’âge. Clairement, elle ne mettait pas en confiance sur la route, mais peu importe puisque la prochaine étape consistait à la préparer pour obtenir le PTH.

C’est si compliqué que ça d’obtenir le Passeport Technique Historique ?

Il s’agit de la mettre en conformité avec sa fiche d’homologation d’une part, et la réglementation FIA d’autre part.

L’ensemble des démarches m’a pris un peu plus d’1 an.

C’est à dire que lorsque j’ai participé au Tour Auto 2022 avec l’Alfa (en Régularité), j’avais déjà la Mustang et j’étais en train de la préparer pour l’édition 2023 de l’épreuve.

La préparation en elle-même consiste donc à prendre la fiche FIA de l’époque et de vérifier que tous les composants présents dans la voiture sont effectivement conformes à cette fiche : moteur, boîte, pont… j’ai donc acheté une boite 4 pour remplacer la boite 3 montée d’origine.

Si les pièces en elles-mêmes se trouvent facilement aux Etats-Unis, les faire livrer en France explose les coûts.

Une fois ceci vérifié, il faut alors la mettre en conformité avec les normes FIA actuelles (en particulier l’annexe K) : arceau homologué, baquet et harnais homologués, extincteur automatique, coupes circuits.

A ce moment, mon budget préparation a déjà dépassé le prix d’achat de la voiture.

Je remplis donc le dossier du PTH et l’envoie à la FFSA en croisant les doigts.

La FFSA le valide et l’envoie à la FIA.

Et là, les retours tombent.

Mauvaise surprise, lorsque j’ai fait monter la nouvelle boite de vitesse, l’atelier m’a monté un levier Hurst qui est certes mieux, mais qui n’est pas standard, donc éliminatoire aux yeux de la FIA.

Donc, commande de levier standard directement aux USA, réception sous 3/4 jours et on change le tout, en profitant de l’occasion pour changer l’embrayage.

Je renvoie mon dossier, et un dernier refus plus tard (cause de vitre ouverte sur les photos du dossier), la partir administrative est enfin validée.

Reste la vérification par un commissaire technique spécialisé sur la Ford Mustang.

C’est donc Alain Goupy (malheureusement décédé en Mai dernier) qui réalise cette inspection finale et met le tampon sur le dossier de ma Mustang.

A ce moment, j’ai officiellement une Mustang 1965 prête à courir en VHC (Véhicule Historique de Compétition).

Ford Mustang 289 (1965)

Moteur : 8 cylindres en V, 4737cc

Alimentation : carburateur quadruple corps Holley

Puissance : 271 ch à 6000 tr/min

Couple : 422 Nm à 3400 tr/min

Freins : disques AV / tambours AR (d'origine : tambours AV/AR)

Transmission : boite manuelle Toploader 4 rapports (d'origine : 3 rapports)

Longueur : 461 cm

Largeur : 173 cm

Poids : 1165 Kg

Donc, prête à remporter le Tour Auto ?

Malheureusement, pas tout à fait.

J’obtiens le PTH, je décide d’aller à la Ferté-Gaucher pour voir ce que donne la voiture sur circuit. Malheureusement, à 5 Km du circuit, je glisse sur une plaque de mazout et la voiture tape un arbre. On est début Février, le Tour Auto démarre dans 2 mois 1/2. D’un coup, tout s’arrête, le longeron avant est touché, j’ai fait tout ça pour rien.

A ce moment, mon réseau se met en route et m’oriente vers l’atelier O-One qui réalise l’impossible et reconstruit intégralement la voiture en 2 mois. On récupère la voiture le 8 Avril, le Tour Auto part le 17 !

Dans tout ça, aucun entrainement ni pour moi, ni pour mon fils et co-pilote Léo, sur une voiture qu’on ne connaît pas très bien et qui est, hormis les modifications requises pour obtenir le PTH, totalement stock niveau châssis et moteur.

Autant courir sur une voiture stock ne poserait pas de problème pour suivre le rythme en Régularité, mais en compétition, notre Mustang manque cruellement de préparation face aux autres concurrentes. La voiture n’a pas été suffisamment préparée pour tourner à fond sur toute la semaine. D’une part, notre châssis manque de rigueur. Mais, pire, dès le 2nd jour, le moteur commence à chauffer. Notre assistance nous conseille alors d’abandonner.

A ce moment, on regarde le chemin parcouru pour arriver là, et on décide de continuer coûte que coûte.

Avec notre V8 qui boit ses 25 litres/100 Km et la nécessité de faire l’appoint d’eau plusieurs fois par jour, on arriverait au bout… mais en effet, au prix de gros retards sur les étapes de liaisons au cours desquelles nous devions souvent nous arrêter. Sur les spéciales, ce n’était pas beaucoup mieux : l’énorme gabarit de la Mustang la rend difficile à placer sur les petites routes de spéciales.

Bref, première pour la voiture en VHC, ma première en VHC en tant que pilote, et aussi la première de mon fils en tant que co-pilote : non, nous ne partions pas pour la gagne.

Malgré tout, c’est une semaine de grand kiffe, avec un niveau de sensations encore supérieur à ce que j’ai connu en régularité. La voiture a tenu tant bien que mal jusqu’à la ligne d’arrivée et nous a assuré une honorable 61e place (sur 98 classés).

Et maintenant ?

Tout d’abord, on a dû refaire le joint de culasse qui n’aura pas survécu à l’édition 2023.

Mais surtout, cela m’aura permis de confirmer qu’en l’état, ce n’est pas une voiture de course. Ma priorité est donc de refaire un châssis pour être plus compétitif sur l’édition 2024 du Tour Auto (toujours en Compétition). Je conserve encore 1 an le moteur stock, on verra sur 2025 si je me lance dans sa préparation.

Mais j’aimerais aussi l’inscrire sur des épreuves sur circuit, où les différentes catégories me permettront d’avoir plus de chances de victoires qu’en Rallye.

Loïc
Rédacteur
Jeremy
Photographe